Nous sommes heureux·ses de vous informer de la réouverture temporaire avant travaux de la Maison Dussac, à Piton Saint-Leu.
L’exposition en cours est ouverte du jeudi au dimanche. Vien a zot !

la programmation

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Lé vivan !
Exposition

hors les murs

Lieu

La Possession - Quartier Saint-Laurent // 40 rue Pablo Neruda

Du mardi 28 mars au vendredi 14 avril 2023

Horaires

Du mardi au samedi
De 9h à 12h et de 13h à 17h

Entrée libre et gratuite
Réservation groupes et scolaires : public@fracreunion.fr

Vernissage

Le vendredi 31 mars 2023 à 16h

Documents à télécharger

Livret pédagogique_Lé vivan ! (715KO)

Lé vivan ! 

Exposition collective - FRAC BAT KARÉ

 


Avec 

Malcolm de Chazal 

Edith Dekyndt 

Philippe Gaubert 

Kid Kreol & Boogie 

Rina Ralay Ranaivo 

Youssouf Wachill 

 


 

Issue de la collection du FRAC RÉUNION, la sélection d'œuvres présentée invite à un temps de contemplation des multiples esthétiques de la nature.

 

Du désir de rehausser les regards vers le sacré du monde, le container se fait temple abritant les manifestations plurielles de l’indicible langage du vivant. Par-là, l’investissement d’une dimension sacrée de l’espace d’exposition participe, par l’émerveillement et le respect qu’elle impose, à l’éclosion d’un “nouveau sentiment de la nature”. Cette expression, issue du livre du même nom de Michel Collot, nous engage à explorer la définition du mot Nature et les liens sensibles qui nous y rattachent ; à revenir vers les notions de coexistence et d’interdépendance au sein même du vivant.

 

Les êtres humanoïdes de Kid Kreol & Boogie nous accueillent. Ils gardent l’entrée et se font les passeurs de l’espace. Silencieusement, ils nous demandent d’abandonner notre égo humain pour renouer avec l’âme infinie du vivant. S'ensuit une galerie où sont nichées les œuvres d’artistes-chamanes. Zénith et Nadir, les photographies de Youssouf Wachill nous amènent à nous pencher vers la magie de petits phénomènes activés à la surface de l’eau. Des cieux les plus lointains aux entrailles de la terre, les images nous signifient les espaces impensés au-dessus et en dessous de nous. Les œuvres de Rina Ralay Ranaivo et de Malcolm de Chazal se font écho. Elles mettent en scène la souveraineté : celle d’une fleur sur deux palmiers pour l’un - celle d’une île comme posée à la surface de l’océan pour l’autre. Philippe Gaubert donne ensuite la parole à quatre bords de l’île de La Réunion dans sa série Rivages. Les chants de ce quatuor encadrent l'œuvre vidéo d'Edith Dekyndt dans laquelle l’artiste nous fait ressentir les vibrations des vents.

 

L’exposition Lé vivan ! est autant une célébration qu'une invitation à nous rappeler notre passé animiste. À comprendre aussi qu’évoluer dans un écosystème, ce n’est pas uniquement interagir de manière physique avec celui-ci, c’est aussi prêter sa voix, ses idées, ses sensations et ses émotions à l’ensemble du vivant. Il nous faut générer une prise de conscience individuelle et collective pour atteindre et expérimenter la magie de la coexistence. Pour ne plus oublier de vivre les petits moments grandioses : s’incliner devant un rivage implacable, rêver les yeux plongés dans une flaque d’eau, ou prêter son attention à l’amour du vent…

 

 

Sanjeeyann Paléatchy 

Commissaire d’exposition 

 


 

Malcolm de Chazal 

 

« On ne peut connaître l’homme si on ne connaît pas la fleur, on ne peut connaitre Dieu si on ne connaît pas le sens occulte de la pierre. La connaissance est indivisible. Et cette connaissance indivisible a été perdue[1] » 

Né en 1902 à Vacoas, Malcom de Chazal est l’enfant terrible de l’île Maurice. Il aurait eu plusieurs vies, pas moins de sept selon Pierre Renaud : l’économiste, le fonctionnaire, l’homme de Sens-plastique, le Lémurien de Pelrusmok, l'homme de théâtre, le peintre naïf et l’écrivain de L’homme et La connaissance. En 1948, George Braque s’adresse à lui dans une lettre pour lui suggérer de peindre. Il ne tarde pas à se lancer dans la peinture à l’huile et montre ses œuvres pour la première fois lors de son exposition à la Librairie Sénèque en 1951. Parallèlement à l’écriture, Chazal donne libre cours à l’expressivité de la couleur en poursuivant plus sérieusement son engagement dans la peinture. Son activité de peintre démarre officiellement en 1958 alors qu’il expose à l’Hôtel de ville de Curepipe.  

« Ma peinture est humaine. Mes maisons, mes fleurs, mes arbres sont des êtres qui parlent et s’expriment.[2] » 

Les fleurs et autres poissons fétiches aux couleurs vives habitent ses toiles, soit un monde de formes sorties tout droit du cahier de dessin de l’enfance[3], ce qui lui vaudra l’étiquette de peintre naïf. Or pour cerner la peinture de Chazal, il faut regarder au-delà des images et percevoir ses toiles et autres gouaches sur papier comme des espaces agissant, des formes phénoménologiques. Son œuvre plastique ne décrit pas le monde, il tisse son rapport au monde. Généralement réalisées sur papier, les gouaches sont figuratives mais elles ne figurent pas seulement des maisons, des fleurs ou des oiseaux, ce qu’on pourrait appeler à tort des paysages ou des natures mortes, elles communiquent tout au contraire la vitalité du monde. Ses « barbouillages », comme il les nomme lui-même, sont donc des exaltations du vivant. La fleur_ qu’on retrouve au centre de la composition Une fleur- deux palmiers, fond bleu et noir_ est un leitmotiv dans son œuvre depuis qu’il entra en émoi devant une azalée du jardin botanique de Curepipe qui semblait le regarder. De cette rencontre est née Sens-Plastique, le livre qui le propulse au rang d’auteur de génie et qui pose sa théorie des sens infinis, un principe de volupté, un dialogue perpétuel des formes dans le monde. « L’amitié de la fleur » fut alors au cœur de sa mythologie personnelle, tout comme le langage des oiseaux et celui de la pierre. Pour Chazal, « la nature nous parle mais nous sommes aveugles et sourds », ainsi le partage du monde végétal et animal est inconcevable. Dans sa littérature comme dans sa peinture, la hiérarchie ou classification des êtres est rejetée au profit d’une réciprocité de l’homme et la nature. On comprend alors que ses peintures qui ne présentent jamais de figure humaine sont pourtant l’incarnation de la relation de l’homme à son environnement. 

De nombreuses œuvres représentent des maisons créoles dans leur environnement naturel (Pointe aux sables, 1965), un univers peuplé d’arbres, de palmiers, oiseaux qui offre une vision délirante célébrant l’âge d’or au centre de la théorie chazalienne, une période idyllique où l’homme vivait en harmonie avec la nature. Que ce soit les vues d’ensemble ou les fragments de nature, oiseaux persifleurs (Deux oiseaux, 1970) et fleurs aux pétales grandes ouvertes, la nature est image où s’affirme d’une part la planéité de la peinture, la perspective est souvent approximative ou complètement écrasée au profit de la platitude, et d’autre part, la ligne est courbe, naturelle, ce qui lui permet de déposer ses sujets comme des motifs, dans une manière décorative à la Matisse, ou de libérer la sensualité des coloris comme dans la poésie visuelle des tableaux d’Etel Adnan.  

 

Diana Madeleine (2020)

 

[1] Malcom de Chazal. Interviewé par radio France en 1970, extraits diffusés dans l’émission Une vie, une œuvre, Malcom de Chazal, un météore dans l’océan indien, Franc culture, 1994.

[1] Amina OSMAN, « Chazal et la vision retournée des choses » dans Notre librairie, n°114, p.99

[1] Amina OSMAN, ibid, p.96.

 

 


 

Edith Dekyndt 

 

Née en 1960 à Ypres en Belgique, Edith Dekyndt travaille à Tournai et Strasbourg. Dès le début de sa pratique à la fin des années 1980, elle témoigne d’un goût prononcé pour les expériences liées à la chimie et à la physique. En 1987, grâce à une bourse de recherche elle part en Italie travailler sur Piero Della Francesca et s’intéresse aux travaux sur la physique de la lumière et la perspective géométrique de ce peintre du Quattrocento. Ce voyage constituera un tournant pour la production de ses travaux artistiques. Évoluant entre art et science, Edith Dekyndt place l’expérience au cœur de son œuvre, ainsi le processus prime sur la forme finie. En 1999, elle crée un collectif appelé « Universal Research of Subjectivity», ce laboratoire artistique donne forme à une quantité de tentatives mélangeant l’univers du quotidien à celui de la recherche.

De toutes petites choses comme une cartouche d’encre, une brique de lait ou encore l’eau savonneuse, deviennent alors entre les mains de l’artiste le prétexte à des essais physiques. La vidéo est l’outil de prédilection qui va lui permettre de capturer un évènement fugace et rendre perceptible un phénomène invisible. 

Ces expérimentations, ces états physiques de transformations convoquent un temps subjectif, un temps suspendu et propice à la poétique d’un retour à l’essentiel.

 

 


 

Philippe Gaubert 

 

Photographier la terre depuis l’océan renverse le regard. La borne visuelle que constitue l’horizon se matérialise alors dans l’épaisseur des éléments naturels en construisant une équivalence entre la visualité et l’expérience. C’est depuis un bateau situé à une centaine de mètres du bord de l’île de La Réunion que Philippe Gaubert a réalisé un portrait photographique du territoire en 1996. Si ce tour de l’île à proximité du rivage circonscrit une terre en offrant une vision totale, soit 630 photographies argentiques noir et blanc, l’île y apparaît pourtant comme impénétrable. Le point de vue choisi par le photographe nous donne à voir son inaccessibilité, car le regard bute constamment sur la roche et la végétation. Les cinq photographies acquises par le Frac Réunion montrent une homogénéité dans les choix opérés par le photographe : même cadrage et lumière. La vue frontale et descriptive masque la profondeur et découpe l’image en trois bandes verticales. Elle rend bien plus compte de la stratigraphie que de la topographie. La perspective est maigre et semble davantage s’inscrire dans l’horizontalité, la circularité du tour de l’île étant suggérée par cet étirement du regard. Gaubert va ainsi à l’encontre de l’exotisme des photographies de lieux insulaires au profit d’une certaine hostilité du paysage, orienté par le regard distancié et le travail subtil des gris. Par cette grandeur non spectaculaire du paysage, ce travail peut faire écho aux ambiances et à l’unité tonale des clichés de Ramily, un photographe malgache dont l’influence a été considérable.

 

Depuis les années 1990, Philippe Gaubert est engagé dans une pratique de photographie documentaire menée en Afrique, en Europe et dans l’océan Indien. Installé à La Réunion en 1990 et diplômé de l’École des Beaux-arts de La Réunion, il s’est formé auprès des photographes de l’association BKL (Bernard, Kugel, Lesaing) et à l’agence Magnum (1999). En 1998, il a ouvert un studio de photographie publicitaire à Antananarivo où il a vécu pendant longtemps. Puis, en 2004, il a intégré l’agence de presse photographique « L’œil du Sud » et s’est installé en Corse. Enfin, depuis 2013, il se consacre à la réalisation de films documentaires comme Être Vahaza tourné à Madagascar (2017). Il vit actuellement entre Madagascar, La Corse et La Réunion.  

Diana Madeleine (mars 2023)

 


 

Kid Kreol & Boogie 

 

D’abord, chacun de leur côté, Kid Kreol & Boogie dessinent, font des graffiti, écoutent du hip hop et lisent des bandes dessinées. Ils sont nourris d’histoires racontées par les membres de leurs familles. Ils partagent la même culture et prennent rapidement conscience de l’importance et de l’urgence de créer et de transmettre un imaginaire péi. Un imaginaire situé à travers lequel les artistes racontent non seulement l’île - sa part visible et sa part invisible - mais aussi la région océan Indien. Ils dessinent, peignent, mettent en volume ou photographient les figures montagnes, les paysages de nuages, les titans, les gardien.nes, les zamérantes, les racines, les forêts, les monstres mythologiques et toutes les entités de l’île. 

 

Le diptyque photographique Masques (2018) présente un personnage masqué, drapé d’un costume ample et blanc. Pieds nus sur les galets de la forêt, il se dresse et nous regarde fixement. Une présence silencieuse et mystérieuse. Son visage est recouvert d’un triangle noir. Les artistes expliquent : « Sa signification est multiple. Comme l’esperluette entre nos deux noms, le triangle symbolise une conjonction d’énergies, le croisement de nos deux regards. Nous ne sommes plus deux, mais trois entités. C’est la forme que nous ne retrouvons pas dans la nature, il est donc un des premiers signes de l’humanité. Et, de fil en aiguille, nous prenons conscience que nous vivons sur un triangle géant.” Le personnage apparaît comme l’incarnation d’un fantôme, d’une zamérante, d’un.e gardien.ne ou encore d’un.e prêtre.sse. Une figure magique et protectrice qui nous interpelle à propos de la part invisible de l’île. Alors, les œuvres se chargent d’une dimension mystique et spirituelle assumée. Elles nous invitent à un état d’attention profonde. Le souvenir suscite l’effort. Il provoque une forme d’épuisement qui vient lutter contre le poids du silence, celui du vide et du secret. Animées par la mélancolie et le chuchotement, les œuvres n’engagent pas de récits déterminés. Kid Kreol & Boogie souhaitent que chacun.e donne libre cours à son propre imaginaire, développe ses propres narrations et expériences. Rien ne nous est imposé, bien au contraire, les artistes proposent une imagerie fouillée au sein de laquelle chacun.e peut tenter de se reconnaître.

 

Julie Crenn (mars 2023)

 


 

Rina Ralay Ranaivo

 

Rina Ralay-Ranaivo commence à filmer son quotidien en 2007. Depuis, il développe une œuvre protéiforme qui allie l’image en mouvement, la photographie et l’installation. Les œuvres fonctionnent comme les éléments extrêmement subtils d’un puzzle dont l’ensemble dessine autant un autoportrait qu’un portrait de Madagascar. Motivé par une attention minutieuse aux détails du quotidien, par une vision intimiste et un engagement sensible envers son île, l’artiste livre des œuvres métaphoriques, propices à la fabrication de récits pluriels.

 

L'œuvre vidéo La Solitude d’une île (2021) a été réalisée à Berlin, où Rina Ralay-Ranaivo venait de s’installer. Le montage articule des plans filmés à Madagascar et en Allemagne. Le temps et la géographie y semblent suspendus. L’artiste regarde avec distance et nostalgie le territoire insulaire dont il est originaire. Avec un sentiment d’expatriation, il pense à Madagascar avec douceur et tension. Les images y sont aussi contemplatives que troublantes. Le calme avant la tempête : une poupée ©Barbie dérive à la surface de l’eau d’une piscine, les chuchotements d’un téléfilm sont sussurés, des herbes hautes dansent dans le vent, une île apparaît au loin, comme posée sur l’océan. Rina Ralay-Ranaivo souligne les bruissements, le silence, la lenteur des mouvements, l’amorce d’un récit, l’attente.

Quelque chose de dramatique se joue en creux des différentes scènes. Un événement latent, une situation pesante. L’artiste précise : “Il y a une légère note politique dans mes intentions à la création de cette vidéo. Je vois de loin mon pays qui continue à s'embourber dans ses multiples problèmes, accentués par la pandémie. À la lecture des articles de presse et des commentaires sur les réseaux sociaux, l'impression que mon île est doublement pénalisée par la solitude et l'isolement était si forte. Il existe déjà, de fait, une solitude liée à la géographie mais elle est aussi idéologique, mentale, un fossé entre le monde et Madagascar.”[1] Alors, le temps suspendu, le silence et l’isolement de l’île nourrissent un sentiment de malaise et d’inconfort que l’artiste saisit dans une vision aussi consciente que mélancolique.

 

Julie Crenn (mars 2023)

 


 

Youssouf Wachill

 

Né en 1943 à Maurice, Yousouf Wachill est arrivé en France 1967 après l’obtention d’une bourse obtenue pour son travail pictural. Il fréquente alors l’Ecole des Beaux-Arts de Paris et participe à des expositions de peinture. S’il est connu à ses débuts en tant que peintre, la pratique de la photographie qu’il mène parallèlement à la peinture, est demeurée une constante depuis 1979. Il s’est fait connaître sur la scène européenne en tant que photographe (expositions à la Maison Européenne de la photographie, Festival international de la Photographie à Liège, Dryphoto en Italie). Son parcours coïncide ainsi avec le développement de la photographie contemporaine française comme celui de Bernard Plossu qu’il admire tant. Les photographies de Wachill en noir et blanc sont des surfaces où jouent les formes et les matières, la transparence et l’opacité, des images sensuelles qui incorpore la dimension « métaphysique » de la photographie, c’est-à dire sa capacité à communiquer de l’être comme a pu le démontrer Roland Barthes. La série Zénith et Nadir réalisée en 1985 est caractéristique de sa manière de fabriquer des mondes et de rendre l’épaisseur de l’espace à partir de la confrontation de quelques éléments, principalement l’eau la lumière. Pour Wachill ce sont « des paysages d’eau qui nous emportent dans leur élan, griffures, objets de mouvements. »

 

Diana Madeleine (2020)

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